Votre panier est vide  Votre compte

Origines

Eddy Murphy et Spike Lee, les Camerounais des Etats-Unis

Si Bimbia est depuis quatre ans sous le feu des projecteurs, c’est sans doute grâce à l’Ancestry Reconnection Program (« programme de retour aux origines »), initié aux États-Unis depuis des décennies par l’association ARK Jammers et qui vise à identifier les trajectoires des navires négriers. Se fondant sur des tests ADN de la firme américaine African Ancestry, il a permis de désigner Bimbia comme l’un des ports d’embarquement.

Eddy 300x336Plus de 8 000 Africains-Américains, dont les acteurs et producteurs Eddy Murphy et Spike Lee, ou encore Quincy Jones, se sont ainsi découvert des racines dans l’actuel Cameroun. Et depuis 2010, ils sont plus de cent cinquante à y avoir entrepris une quête de soi, cherchant à retrouver un peu de la culture de leurs ancêtres, de la même façon que les Italian Americans ou les Irish Americans perpétuent leur culture européenne.

Autobaptisés « Caméricains », ces Cameroonian Americans sont donc passés par Bimbia. Une étape à leurs yeux si symbolique et si incontournable qu’ils se soumettent aujourd’hui à une cérémonie de purification dans l’océan Atlantique, suscitant un regain d’intérêt et des levées de fonds. C’est d’ailleurs l’ambassade des États-Unis qui, la première, a décidé d’agir, provoquant dans un premier temps l’ire des autorités camerounaises.

Mais si les États-Unis ont accordé 40 millions de F CFA à la Route des chefferies, le projet Documentation et Restauration implique désormais le ministère camerounais de la Culture. Il permettra de mettre en place une signalétique délivrant des informations historiques sur le site, tandis que des vestiges de la période seront également collectés, catalogués et exposés. La construction à Limbé d’un musée d’histoire est sur les rails.

Arrière-petit-fils du King of Bimbia, l’ethnologue et historien Kuma Ndoumbe III, professeur en sciences politiques, lui, estime qu’il faut aller plus loin. « Ce serait une erreur de se focaliser sur Bimbia, affirme-t-il. Les statistiques indiquent qu’il est parti davantage d’esclaves de Douala que de Bimbia, entre 1777 et 1821, sans que se profile aujourd’hui l’ombre d’un projet. »

Professeur d’études africaines et africaines-américaines à l’université de l’Arizona, Lisa Aubrey avance le chiffre de 46 000 à 68 000 esclaves pour l’ensemble du Cameroun, ce qui en ferait un centre de la traite négrière. De nouvelles fouilles pourraient révéler d’autres vestiges. Ainsi, à Douala, des marchés aux esclaves se sont tenus directement sur le fleuve Wouri : il faut donc y rechercher des forts. Sous le régime Ahidjo, certains avaient servi de prisons pour opposants politiques. « Malheureusement, le Cameroun cultive son amnésie », regrette Kuma Ndoumbe III.

 Jeune Afrique

Ajouter un commentaire

 

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021